Anti-Intelligence ?
- Charlotte
- 26 mai 2018
- 5 min de lecture
L’adjectif qualificatif « intelligent », c’est le temple que l’on ne doit pas blasphémer, mais qui est fréquenté, utilisé à toutes les sauces, à la cérémonie de remise de diplôme aussi bien qu’à la victoire d’une partie de bataille navale. Chacun s’est vu sacré « intelligent » en adoptant une pseudo stratégie au monopoly ou en ramenant un 17/20 en mécanique. Et pourtant…
Ramener un 20 en maths, décrocher un prix d’éloquence, rendre une copie de philo à deux doigts du corrigé, réussir sa dictée sans aucune faute d’orthographe, ce n’est pas être Intelligent. Ou du moins, ça ne suffit pas.
Aujourd’hui, être « intelligent » semble être le passeport pour l’avenir, le compliment qui fait rougir ou celui qui peut causer un gonflement des chevilles (bizarrement sans réaction inflammatoire). Sans doute « intelligent » fait-il partie de ces mots qui signifient énormément mais sont utilisées pour dire peu; sa définition intégrale ne peut tenir en sa si petite taille. Wikipédia définira l’Intelligence en quelques lignes, qui pourront faire débat. Mais peut être que c’est l’Intelligence en elle-même, et tout ce qu’elle implique, qui est susceptible de faire débat.
L’intelligence fait couler de l'encre (l'encre coule t'elle seulement s'il y a intelligence ? Peu probable), et les intelligences se font la guerre, c’est la guerre de tout contre tout (à travers un prisme pessimiste, et si l’intelligence était le loup de sa propre définition ?).
Les algorithmes prennent du terrain sur le cerveau humain, tandis que l’imagination humaine marque des points devant le faible mode « aléatoire » de l’ordinateur. Alors peut être faudrait-il renverser le système de valeurs mis en place par l’humain et incrusté en lui, et redécouvrir un certain humanisme, en concurrence ni avec un genre électronique, ni avec un prototype transhumaniste, mais plutôt droit sur lui meme. L’objectif étant de tendre vers un futur humain bel et bien humain, et non doté d’une soi-disant intelligence parfaite et dont les failles seraient celles des généticiens. Se pose alors la question de savoir que faire de l’Intelligence, une fois trouvée et définie.
L’Intelligence, on ne la trouve pas entre les équations diophantiennes ni dans les logarithmes, non plus dans les livres d’histoire-géo. Coincée entre deux neurones peut être ? C’est peu probable. Alors où la chercher ? Si son ombre n’est pas décelable à l’école, on pourrait être tenté de dire qu’on la trouve au fin fond de notre ADN, que l’intelligence a des racines dans nos gènes. Ce qui ne serait pas entièrement faux dans la mesure où l’origine génétique du quota d’intelligence a de moins en moins de doutes. Mais là, je tiens à allumer les warnings pour éclairer un autre problème que soulève le mot meme « intelligence ».
Car non, QI <≠> Intelligence.
Et pour cause, la multiplicité de ce que sous entend l’Intelligence (appelons φ cette Intelligence avec un grand I, qui fait envie à chacun). Le psychologue Gardner affirme que φ = ∑ de 7 « intelligences ». φ regrouperait l’intelligence linguistique, logico-mathématique, spatial, musicale, corporelle, inter- et intra-personnelle. D’où l’incapacité du 20 en maths de couronner qui que ce soit « Intelligent » ou détenteur de l’Intelligence φ.
Et là s’est glissée dans la société une erreur de taille, celle qui consiste à classer ces types d’intelligence, bien souvent selon leur aptitude à se révéler dans le milieu scolaire.
On dira que l’intelligence logico-mathématique vaut mieux que l’intelligence corporelle, invoquant la capacité de la premiere à produire ses effets en devoirs de maths, et celle de la seconde de « seulement » rendre possible un poteau rentrant au foot. L’enfant peut alors reveler son intelligence disons « scolaire » par le biais de la logique, tandis que celui qui excelle dans ses relations sociales aura plus de mal à être reconnu comme une personne « intelligente », la sociabilité n’étant pas évaluée dès le plus jeune age comme le sont le français, les maths, l’anglais et j’en passe.
Voire pir, on réduira φ à intelligence logico-mathématique, sous prétexte qu’elle sert la science plus que les autres, et qui dit science sous entend bien trop souvent vérité, réalité, supériorité, objectif supreme… ce qui mène à l’idée répandue que les sciences valent mieux que la littérature ou que l’art (pourquoi 3 classes de S et 1/2 de L ?), mais c’est un sujet à part entière.
Alors, on nous dit que l’Intelligence vient d’une part de nos gènes, d’autre part d’aptitudes variées développées au cours de l’apprentissage et de la société. On peut légitimement se demander ce qui se cache réellement sous ce gros mot, qui discrimine certains et qui en sacre d’autres. Selon les référentiels d’étude, la réponse variera du neurologique à l’ontologique, mais la mienne ne sera qu’empiriste.
Si l’Intelligence ne provient pas intégralement de notre ADN, alors des facteurs extérieurs entrent en comptent et modele le cerveau, la pensée, et donc la relation que chacun entretient avec les deux. Ils modèlent l’intelligence, initialement en chacun mais sous des formes si variée qu’on a du mal à les rassembler sous un meme mot sans faire erreur. L’intelligence serait alors dans la relation que chacun a avec ses obligations et les contraintes; et de plus que l’intelligence pratique qui finalement, provient du calcul, l’Intelligence aurait cette hauteur qui rendrait possible l’introspection, et donc la capacité à se modifier soit meme pour tendre vers un réel (ou pourquoi pas vers un imaginaire pour les plus rêveurs) désiré. ROUSSEAU n’a t’il pas dit que l’Homme était perfectible ?
Et c’est justement à propos de ce réel attracteur, ou rêve inspirant, que l’Intelligence doit guidé l’humanité, avec raison, éthique, et pourquoi pas quelques volutes de folie pour rendre le futur un chouïa utopique. Parce que l’utopie sert à continuer à marcher, pour reprendre un article du journal Le UN. C’est avec l’Intelligence, que l’homme doit décider de sa modification intrinsèque, du chemin à emprunter demain. L’humanité, dotée d’une volonté qu’il reste à unifier, et d’une conscience qu’il faudrait parfois remettre sur le droit chemin de l’éthique, a cette capacité à prendre le contrôle sur lui-même et sur son avenir. Et quel avenir ? Les individus ayant l’influence la plus grande sur cet avenir sont malgré tout les puissants, à la tete de Républiques, de pseudo-Républiques, voir de dictatures affamées. Alors, alors qu’il fasse fluctuer l’Intelligence, pour si possible faire advenir un futur désintéressée, un meilleur monde peut être ? Ou plutôt, avant tout scénario utopique, un futur humain… à moins qu’une intelligence souhaitant un futur humain soit utopique, humain impliquant peut être par essence imparfait ? Le progrès vers la perfection séduit, et avance à vitesse exponentielle, mais le mieux n'est-il pas l'ennemi du bien ? Peut-Être le parfait est-il l'ennemi de l'humain...
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